Degrés d’attitude

1995 - 2005

Dix années d’art contemporain

2000

Du 12 mai 

au 26 juin 2000

Digne-les-Bains

Galerie du Cairn

Musée-Promenade

de la Réserve géologique

de Haute-Provence

Catalogue de l’exposition publié par Degrés d’attitude sous la direction de Françoise Mabile

Le site d’Arnaud Bruni

UNE MÉMOIRE DE PIERRE 

ET DE TERRE


Arnaud Bruni


Arnaud Bruni

Photographe

Depuis sa création en 1995, Degrés d’attitude - art contemporain, privilégie les échanges entre les artistes-plasticiens du Nord et ceux du Sud et développe des activités pédagogiques auprès du public scolaire.

Degrés d’attitude présente les travaux du photographe lillois Arnaud Bruni, accueilli en résidence au Cairn de Digne-les-Bains.

Le travail sur site d’Arnaud Bruni a porté sur la notion de mémoire, thème récurrent chez lui, mais aussi sur celle de préservation et de parcours. À travers son installation, c’est justement un parcours qu’il propose, combinant divers aspects liés à la géologie.


Degrés d’attitude

Art contemporain



Le Cairn est la dénomination des actions d’art contemporain du Musée départemental de Digne sur le territoire et avec la complicité de la Réserve géologique de Haute-Provence. Le parti pris du Cairn est d'inviter des artistes en résidence à Digne, au Musée-promenade, afin qu'ils explorent le territoire et fassent des propositions visuelles et plastiques, dans l'esprit des lieux. Les interventions peuvent prendre la forme d'expositions temporaires, d'installations pérennes ou éphémères, de commandes publiques, d'éditions, etc.

Le Cairn a pour ambition de favoriser les rencontres entre les créateurs et le pays dignois appréhendé dans ses différentes composantes : rurales, écologiques, sociales, historiques... et de faciliter la mise en œuvre du projet. Son objectif est de constituer un patrimoine contemporain au cœur du pays dignois et de lier création contemporaine et développement durable.


Nadine Gomez-Passamar et Guy Martini

codirecteurs du Cairn

Fragments de réalité déplacés


"J'écris avec la photographie"

Arnaud Bruni caractérise ainsi sa démarche.

Son écriture, pour la résidence d'artiste de quelques mois à Digne, commence d'abord par un parcours pédestre réalisé selon des courbes montantes ou descendantes et des boucles sur le territoire de la réserve géologique, en quête d'indices de la nature.


La salle voûtée où s'inscrit son oeuvre fonctionne comme une boite crânienne, comme une surface rétinienne, où se constituerait l'image mémorisée des sites scrutés. Les traces qui la composent résultent d'emprunts réalisés directement par la main qui frotte, qui moule ou qui prélève et d'enregistrements produits par l'intermédiaire de l'oeil photographique qui saisit formes, fractures et textures dans l'infiniment grand des parois de schiste aussi bien que dans le détail d'une roche.


La plupart des pièces présentes à la réserve de Digne jouent sur l'écart, le décalage, le déplacement, révélant une démarche artistique qui travaille l'entre deux :


Entre le grand et le petit, le gigantesque et le fragment ;

Entre deux plaques, pour ériger et monumentaliser un fragile prélèvement

entre deux, celle de l'image d'un fragment de réalité et le frottage produit à partir de cette même réalité ;

Entre ciel et sol, suspendu, format carré de roche millénaire fragilisé par l'installation aérienne ;

Entre photographie imprimée et paysage, image froissée à laquelle le geste confère un relief topographique ;

Entre nature et géométrie ;

Entre nature et culture.


A l'instar de Richard Long auquel il a consacré un projet d'oeuvre hommage, Arnaud Bruni en choisissant l'expression en noir et blanc, installe une distance avec une vision pittoresque du paysage. D'ailleurs n'arrive-t-il pas à conférer de la plasticité à sa photographie ? Approche sensorielle aussitôt radicalisée par l'inscription dans des formes sèches : carré, rectangle, pyramide ...


A l'Institut Universitaire de Formation des Maîtres où il est intervenu avec des élèves, Arnaud Bruni travaille le réel et son double, autre entre deux qui requiert de situer ses pas et son oeil depuis le point de vue choisi par l'artiste.


Alors l'écriture photographique d'Arnaud Bruni est-elle descriptive ? Non puisque l'auteur interfère sans cesse un écart entre sujet et objet pour inviter le spectateur à reconsidérer son expérience visuelle à partir des fragments déplacés.

L'écriture photographique est discontinue, indicielle, suggestive. C'est un itinéraire poétique, un conte entre ciel et terre.


Michel MOTRÉ

Juin 2000